Source: RFI
Annotated transcript of a debate 17 May on RFI about the rights of homosexuals in Africa between Charles Gueboguo sociologist, Cameroon, Halexander Jann, director and singer Franco-Gabonese, President of the Cultural Committee of Tjenbé Rèd Prevention and Alice Nkom, Cameroon lawyer, founder of the Adéfho -- Google translation of transcript to English
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Transcription annotée d'un débat tenu le 17 mai 2011 sur RFI au sujet des droits des homosexuel/le/s en Afrique entre Charles Gueboguo, sociologue camerounais, Jann Halexander, réalisateur et chanteur franco-gabonais, président de la commission culturelle de Tjenbé Rèd Prévention, et Alice Nkom, avocate camerounaise, fondatrice de l'Adéfho)
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Rivière-Pilote - Yaoundé - Paris, lundi 22 août 2011
Communication n°TRF2011-31B
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Le 17 mai dernier, en direct sur RFI (Radio France Internationale), trois acteur/e/s de la lutte contre les homophobies en Afrique et parmi les populations originaires d'Afrique échangeaient leurs points de vue lors d'une émission animée par Jean-François CADET : «Droits des homosexuels en Afrique : où en est-on ?» [1]. Il s'agissait des personnes suivantes :
Charles GUEBOGUO, sociologue, spécialiste de la question de l'homosexualité en Afrique, auteur de : «La question homosexuelle en Afrique : le cas du Cameroun» (éditions L'Harmattan ) [2] ;
Jann HALEXANDER, réalisateur et chanteur franco-gabonais [3], président de la commission culturelle de l'association Tjenbé Rèd Prévention (Association de prévention des racismes, des homophobies & du sida issue des communautés afro-caribéennes) [4] ;
Me Alice NKOM, avocate camerounaise et fondatrice de l'Adéfho (Association de défense des homosexuels) [5].
Voici la transcription intégrale et annotée de leurs échanges, particulièrement éclairants - quelques menues anacoluthes étant amendées [entre crochets] avec l'accord de leurs auteur/e/s.
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00:00 | JEAN-FRANÇOIS CADET - Ce soir, à l'occasion de la Journée mondiale de lutte contre l'homophobie, [nous parlerons] des droits des homosexuel/le/s en Afrique : [proposition] de loi anti-homosexualité en Ouganda (même si son examen a été repoussé sine die ) [6], viols «correctifs» [sic] de lesbiennes en Afrique du Sud [7], arrestations au Cameroun [8] ou encore au Sénégal [9]... Le sujet est régulièrement au cœur de l'actualité. Où en est-on ? Comment considère-t-on les homosexuel/le/s sur le continent ? Avec nous, trois invité/e/s : Maître Alice Nkom, avocate camerounaise, fondatrice de l'Adéfho (Association de défense des homosexuels), en ligne de Yaoundé [au Cameroun] ; en ligne des États-Unis [d'Amérique], le sociologue Charles Gueboguo, [auteur de] : «La question homosexuelle en Afrique : le cas du Cameroun» (aux éditions L'Harmattan ) et à mes côtés en studio [à Paris] le chanteur et réalisateur franco-gabonais Jann Halexander. La cause homosexuelle [est-elle] en train de progresser en Afrique ?
00:58 | JANN HALEXANDER - Indéniablement mais au lieu d'employer le mot de cause , il faudrait plutôt employer [celui de] sécurité [qui renvoie à] l'idée que des gens qui ne sont pas hétérosexuel/le/s ont le droit de vivre comme les autres et ne soient pas harcelé/e/s, tué/e/s, persécuté/e/s, violé/e/s...
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«Il ne fait pas bon être homosexuel en Afrique,
on apprend des choses absolument horribles
contre lesquelles il faut qu'on se mobilise»
(Me Alice Nkom)
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01:17 | JFC - Vous parlez de sécurité : cela veut dire, Maître Nkom, qu'il est dangereux aujourd'hui d'être homosexuel/le sur le continent africain ?
01:25 | ALICE NKOM - Oui, malheureusement, il ne fait pas bon être homosexuel/le africain/e, vivant en Afrique... si je m'en tiens à l'exemple camerounais, à ce qui se passe en Ouganda et un peu partout. Même là où on n'a pas criminalisé l'homosexualité, comme en Afrique du Sud, on apprend des choses absolument horribles [contre] lesquelles il faut qu'on se mobilise.
01:55 | JFC - Charles Gueboguo, toujours sur le constat, est-ce qu'on peut dire que l'Afrique est homophobe ?
02:04 | CHARLES GUEBOGUO - [Selon] moi, il serait difficile de parler d'homophobie en Afrique quand on sait la charge historique que porte le concept, en lui-même, et là je me pose en tant qu'analyste exclusivement. Je parlerais plutôt du sentiment anti-homosexuel qui, justement, retrace le paradoxe entre des sociétés - pour la plupart en Afrique - homophiles ou homosociales et des sentiments qui sont considérés comme étranges, étrangers. Le rapport homosexuel ou le sentiment homosexuel s'expriment de plus en plus en public : est-ce qu'il faudrait parler d'homophobie ? [...] D'une part, vous avez dans la société cette division des genres qui est très stricte, où les hommes se plaisent à être entre eux et où les femmes se plaisent à être entre elles : c'est culturalisé, accepté. D'autre part, [vous avez] les persécutions de personnes de même sexe qui s'aiment, toujours dans cette même société. Ce paradoxe, je «l'adresse» [ anglicisme, NDLR : «je l'étudie»] en termes de sentiment anti-homosexuel . Maintenant, toute la forme légalisée qu'on observe aujourd'hui et qui nous vient [...] la plupart du temps d'Occident est ce que j'appelle l'homophobie d'État. Oui, il existe une forme d'homophobie d'État en Afrique.
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«Il existe un paradoxe
entre ces sociétés africaines homosociales
- où les hommes se plaisent à être entre eux
et les femmes se plaisent à être entre elles -
et le fait qu'elles considèrent
les sentiments homosexuels comme étrangers»
(Charles Gueboguo)
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03:30 | JFC - Jann Halexander, ce qui pose problème aujourd'hui, [est-ce] l'homosexualité en elle-même ou l'affichage en public de l'homosexualité ?
03:37 | JH - Je suis très content qu'il y ait aussi Charles Gueboguo parce qu'il a été l'un des premiers sociologues africains, notamment de langue française, à aborder de plein fouet cette question. La bisexualité, il ne faut pas se leurrer, est très répandue en Afrique. Il ne faudra pas se mettre des œillères, elle est très répandue dans les pays du Sud, que ce soit en Amérique du Sud, en Afrique ou en Asie. Cela rejoint ce que vous dites : ne pas en parler, faire régner l'omerta... très bien ! Au Cameroun, on parle d'ailleurs du «bilinguisme» pour [évoquer ces] hommes mariés qui vont fréquenter des minets dans les bas quartiers mais s'affichent publiquement homophobes... Tant que règne l'omerta, ça va [mais] à partir du moment où une personne commence à dire «je», «je suis», «j'existe», «j'entends être ce que je veux», ça pose problème. La lutte contre le rejet des homos, des lesbiennes, des bisexuel/le/s, des transsexuel/le/s, sert tout le monde, elle sert tou/te/s les Africain/e/s, parce qu'il ya un très gros problème dans les sociétés africaines contemporaines et je sais de quoi je parle (j'ai vécu seize ans à Libreville, je suis métis, franco-gabonais, mère blanche, père noir). Il ya un problème avec l'idée de la différence, de quelqu'un qui est différent. Évidemment, si vous êtes homo, vous êtes vraiment en première ligne mais vous pouvez être aussi d'une minorité ethnique, vous pouvez être une femme, vous pouvez ne pas être comme les autres, vous pouvez ne pas avoir la même culture que la majorité et on vous le fait payer au nom de valeurs «africaines» - d'une certaine «africanité» dont on ne sait pas trop ce que c'est.
05:16 | JFC - Cela veut dire, Charles Gueboguo, que l'homosexualité est perçue comme une importation occidentale - à tort ?
05:21 | CG - Exactement. Dans l'ensemble des imaginaires locaux, on observe comme une manière de penser qui voudrait que l'homosexualité soit l'importation de l'Occident et notamment des Blancs. C'est un tort de penser ainsi, [plusieurs] études anthropologiques l'ont montré, je l'ai également montré dans mes travaux, mais en même temps cette logique peut s'expliquer, se comprendre. On sait qu'aujourd'hui, dans la course à la mondialisation, les Africains semblent avoir tout perdu, n'avoir rien à proposer. Alors, ils essaient de récupérer cette idée de «non-africanité» de l'homosexualité pour essayer de se poser dans cette globosphère, d'apporter ce qu'ils appellent (entre guillemets, comme le disait Jann tout à l'heure) les «valeurs africaines», essayer d'avoir en quelque sorte un mot à dire dans cette culture. Ils font appel à ce qu'ils [nomment] une sorte d'authenticité mais on se pose encore la question de savoir quelle est-elle : qu'on le veuille ou non, le monde est métis, l'Afrique est métisse. L'Afrique a connu des influences, l'Afrique est dans cette croisée-là et on ne peut pas la lire autrement. Aujourd'hui, parler de l'homosexualité comme d'une importation occidentale reste [selon] moi une stratégie politique de positionnement dans cette globosphère, parce que l'Afrique est pauvre, elle n'est même pas maîtresse de sa pauvreté, elle n'est même pas maîtresse de son devenir ou semble ne pas l'être et alors on cherche comme [cela] des subterfuges pour essayer de se positionner.
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«Au Cameroun, on parle de bilinguisme pour évoquer
ces hommes mariés qui vont fréquenter
des minets dans les bas quartiers
mais s'affichent publiquement homophobes...»
(Jann Halexander)
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07:03 | JFC - Maître Alice Nkom, est-ce que l'homophobie est une expression parmi d'autres de la haine du Blanc ?
07:12 | AN - Je ne sais pas s'il faut [le dire ainsi] mais c'est certainement en partie vrai, parce que lorsque je discute de ce sujet ici, on me dit toujours qu'effectivement, l'homosexualité, c'est le colon. On cite même un ancien gouverneur du Cameroun comme étant le «grand manitou» de l'homosexualité au Cameroun [qui] aurait fait de l'homosexualité un ascenseur social, à travers lequel tous nos pères fondateurs du Cameroun sont [NDLR : «seraient» ?] passés. Il ya ce rejet qu'on colle à cette image du colon qui a aidé à fabriquer le Cameroun et les dirigeants camerounais d'aujourd'hui. Bien évidemment, ça traduit la haine du Blanc mais d'un autre côté, ceux qui vous disent que l'homosexualité est contre la religion et qui vous plaquent Sodome et Gomorrhe sur le visage oublient que la religion en question (qu'elle soit musulmane ou chrétienne) est une religion d'importation également - par les Blancs.
08:29 | JFC - Jann Halexander, est-ce que les églises (au sens large, églises chrétiennes, l'Islam également) sont des obstacles aux droits des homosexuel/le/s aujourd'hui ou est-ce qu'on instrumentalise la religion ?
08:44 | JH - Ce n'est pas un mystère, que ce soit en Europe de l'Ouest, de l'Est ou en Afrique, on ne peut pas dire que les religions soient très gay-friendly (en tout cas dans la pratique, bien qu'il y ait évidemment aussi des gens qui sont pratiquant/e/s et qui sont tolérant/e/s).
09:01 | JFC - Donc pas plus en Afrique qu'ailleurs ?
09:04 | JH - Je ne sais pas, je ne crois pas... Au Gabon, quelque chose est très resté ancré, c'est l'animisme. C'est un peu tabou mais le rapport au corps, à la sensualité, à la sexualité est quelque chose de très concret dans les pratiques animistes et n'a pas été encore complètement mis à mal par les religions (au Gabon, protestante surtout, protestante austère, catholique et dans une moindre mesure [...] musulmane).
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«Lorsque l'Église a dénoncé les homosexuel/le/s,
le président de la République est intervenu
pour dire : Stop, c'est la vie privée»
(Me Alice Nkom)
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09:38 | JFC - Et pour vous l'animisme explique pourquoi au Gabon les choses se passent mieux que dans d'autres pays - parce qu'au Gabon on ne réprime pas aujourd'hui l'homosexualité ?
09:45 | JH - Attention, c'est risqué d'aller sur cette pente-là. Le Gabon est un petit pays, très cosmopolite, qui a été occidentalisé, mondialisé avant les autres. Les Gabonais ont très vite vu ce qui se passait ailleurs dans le monde. Il ya eu une période sombre pour les homos au début des années 80, la police qui venait et tout... Cela a un peu changé [mais] il ne faut pas dire que c'est le paradis... [Paradoxalement, dans la vie de tous les jours,] c'est beaucoup plus facile d'être homo et gabonais dans les classes moyennes, petites classes, que dans les classes aisées... [Cependant, en cas de problème avec la police ou la justice, cela reste évidemment] beaucoup plus facile si vous avez de l'argent que si vous êtes pauvre pour vous défendre... [10] [En effet,] vous pouvez toujours être poursuivi/e pour atteinte aux bonnes mœurs, juridiquement : il n'y pas d'espace [légal ou officiel reconnaissant clairement] qu'il ya d'autres genres sexuels que l'hétérosexualité. Cela dit, il faudrait aussi garder espoir : d'abord, il ya des millions d'Africain/e/s qui ne sont pas homophobes. L'homophobie n'est pas une authenticité africaine donc ce n'est pas naturel d'être africain/e et homophobe. Il ya beaucoup d'Africain/e/s, hommes et femmes, du Nord au Sud, qui ne sont pas homophobes et il ya de l'espoir parce que par rapport à l'an dernier, davantage de pays africains - dont le Gabon - ont signé la «charte de dépénalisation mondiale de l'homosexualité» mise en route par l'ONU [11].
11:18 | JFC - Est-ce qu'il ya des raisons d'être optimiste, Maître [Nkom] ?
11:23 | AN - Oui, je pense qu'il ya des raisons d'être optimiste, même si aujourd'hui au Cameroun la réforme du code pénal ne laisse pas beaucoup de place à l'espoir (j'ai encore trouvé que le délit d'homosexualité était prévu dans le nouveau code, lorsque l'on étudie la réforme aujourd'hui). Ce qui me donne beaucoup d'espoir c'est que, lorsque l'Église catholique a dénoncé les homosexuel/le/s du Cameroun en 2005 ou 2006, le président de la République [Paul Biya] est intervenu pour dire : «Stop, c'est la vie privée des gens, vous n'avez pas à vous [en] mêler, c'est sacré» (alors, il ne faut pas spéculer sur les «vices» des uns et des autres) [12]. Je pense donc que le président de la République est conscient de son devoir de garant de toutes les libertés, [de] tout le monde, quelque soit l'âge, le sexe, la religion et à plus forte raison l'orientation sexuelle des uns et des autres. Je crois que l'un de ces quatre matins, nous pourrons, en le citant, faire échec à la montée de l'homophobie (qui est le fait de quelques-uns seulement de ses collaborateurs, [lesquels] malheureusement sont bien placés aujourd'hui pour pouvoir induire un nouveau code qui ne prend pas en compte les engagements internationaux du Cameroun - parce que le Cameroun a signé tous les traités et toutes les conventions [dans] lesquels on refuse la discrimination de quelque nature que ce soit).
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«Il est bon de distraire la population
- surtout quand on parle de pouvoirs illégitimes -
en lui donnant les homosexuel/le/s en pâture»
(Charles Gueboguo)
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13:01 | JFC - Charles Gueboguo, est-ce que vous avez le même diagnostic que Maître Nkom sur le cas camerounais, puisque vous l'avez étudié de près ?
13:08 | CG - Je partage totalement l'avis de Maître Alice Nkom, non seulement sur le cas camerounais mais également sur le cas de plusieurs pays africains. Ce que je voudrais apporter à son analyse serait qu'il ne faudrait pas qu'on oublie également qu'il nous faut du temps : il faut inscrire le changement dans le temps, parce que malheureusement on ne change pas les mentalités à coups de décrets.
13:33 | JFC - Cela veut dire que la réponse n'est pas essentiellement politique ?
13:39 | CG - La réponse n'est pas essentiellement politique mais le politique peut jouer un rôle fondamental parce qu'après il faudrait éduquer les populations. Les associations comme celles de Maître Alice Nkom et d'autres en Afrique subsaharienne jouent déjà ce rôle, petit à petit, avec le peu de moyens [qu'elles] ont, à travers les médias, à travers le porte-à-porte... Les résultats ne peuvent pas se mesurer tout de suite, on les aura peut-être dans vingt ans ou dans dix ans, mais le politique a un rôle fondamental à jouer. Encore maintenant faudrait-il qu'il y ait une volonté politique or parfois cette volonté politique ne se manifeste pas, parce que, comme je le disais au début, elle s'inscrit dans une logique où il est bon de distraire la population - surtout quand on parle de pouvoirs illégitimes - [en lui donnant], la plupart du temps, les homosexuel/le/s en pâture...
14:35 | JFC - Donc les homosexuel/le/s sont un bouc émissaire pour un certain nombre d'hommes politiques africains ?
14:39 | CG - Exactement, un bouc émissaire, un exutoire, une sorte de catharsis... Autrement, on ne peut pas défendre une politique de mauvaise gouvernance, de gouvernement corrompu, on ne peut pas défendre la famine, la paupérisation des sociétés africaines... quand on sait que le sol africain - entre autres - est très riche ! D'une part, il ya cet espoir que je lis et je partage l'avis de Maître Alice Nkom mais, d'autre part, je sais qu'il faudrait du temps (un temps qui va s'inscrire dans la durée).
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«Des Africains noirs disent
que l'homosexualité est un truc de Blanc
mais sont bien contents d'avoir la voiture des Blancs
et de prier pour un Jésus blanc»
(Jann Halexander)
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15:16 | JFC - Jann Halexander, quel regard portez-vous sur ce qui se passe en Ouganda (comme le Gabon, pays d'Afrique centrale), avec ce débat parlementaire qui a été repoussé sine die mais quand même [cette proposition] de loi anti-homosexualité qui a été présenté[e] et qui prévoit la peine de mort dans certains cas contre les homosexuel/le/s ?
15:35 | JH - Vous voyez qu'avec Charles Gueboguo ou Alice Nkom, on vous dit à peu près la même chose. Avant de répondre, [je voudrais dire] que je suis toujours affligé quand je vois des Africain/e/s noirs qui disent que [l'homosexualité] est un truc de Blanc et [sont par contre] bien contents d'avoir la voiture des Blancs, l'ordinateur des Blancs, le dernier confort ultra-luxe tel qu'on le voit dans les publicités occidentales, de prier pour un Jésus blanc, une Marie blanche... mais par contre «ça» [l'homosexualité], ça leur pose problème ! [Concernant] l'Ouganda, j'ai du mal à me réjouir. Effectivement, pour le moment [la proposition de] loi est suspendue mais rien n'est réglé : des gens se réjouissent bien trop vite, je suis très perplexe, j'attends de voir ce qui va se passer, il faut toujours rester en alerte. Il est clair que cette loi avait été proposée par ce monsieur, David Bahati, en pleine crise : des Ougandais manifestaient contre la faim, contre la crise économique, et vous voyez que - comme par hasard ! - c'est ce jour-là qu'on veut proposer un truc pour discriminer les homos [6]. Dernier point, par rapport au Gabon : c'est peut-être plus sûr d'être à l'heure actuelle une lesbienne dans un quartier de Libreville ou de Port-Gentil [au Gabon] qu'à Soweto [en Afrique du Sud]. Pourtant, en Afrique du Sud, c'est légalisé, c'est reconnu mais les meurtres atroces qui [s'y] passent régulièrement en ce moment montrent bien qu'une politique ne suffit pas (qu'une réponse juridique, une loi, ne suffit pas) : il faut aussi un changement de mentalité.
17:19 | JFC - Alice Nkom, quelle action concrète sur le terrain, au quotidien, peut-on mener pour faire accepter l'homosexualité ?
17:29 | AN - Il faut combattre l'ignorance. Beaucoup de gens prêchent par ignorance. J'ai vu ici un cardinal organiser des marches, faire signer des pétitions à ses ouailles en disant «Voilà, le Cameroun s'apprête à légaliser l'homosexualité !» alors qu'il était simplement question de ratifier le protocole de Maputo [13], qui n'a pas une ligne, pas un mot sur l'homosexualité, bien au contraire (qui rassemble les droits des femmes africaines). Je l'ai vu le faire et je l'ai entendu dire que «les homosexuel/le/s sont moins que des animaux parce que les animaux ne sont pas homosexuel/le/s», ce qui est faux : c'est de l'ignorance. De la même façon, lorsqu'un prélat de ce niveau-là parle à ses ouailles, on ne leur dit pas, par exemple, que l'Église catholique en sa plus haute échelle, le Vatican en tant qu'État, consacre la séparation des pouvoirs et ne va jamais jusqu'à la répression des homosexuel/le/s. Cela résulte d'une déclaration - claire et nette ! - du Vatican faite à la LXVIIIème session, je crois, de l'assemblée générale des Nations unies [NDLR : Plutôt, semble-t-il, la LXIIIème ] [14]. Le Vatican en tant qu'État sait très bien et affirme que l'égalité des droits, l'appartenance aux Nations unies, la ratification de tous les traités sur la non-discrimination, la non-violence, la non-torture ne [lui] permettent pas de [réintroduire] les dogmes religieux dans l'État et le Vatican n'a jamais réprimé un seul homosexuel !
19:21 | JFC - Merci à vous.
HT: Tjenbe Red
Je crois que l'homophobie et la transphobie en Afrique venne de la pauvreté et le bas niveau de alphabetisme qui fait l'ignorance et l'intolerance. Je aussi affirme que l'attitude discriminatoire aux colorés par les européens et la minorité de la langue français comme une langue internationale aussi aggrave la situation en Afrique francophone.
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